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Daniel Brissaud

 

Charles Handy

Auteur, depuis plus de quarante ans, d’opus qui ont révolutionné nos façons de penser le management, Charles Handy, célèbre professeur et consultant, livre aux « Echos Business » sa réflexion sur les mutations du monde économique.

Charles Handy est un professeur de management à la London Business School, consultant et auteur irlandais en culture d’entreprise et en organisation. Il a inventé le concept des quatre dieux du management : Zeus, Apollon, Athena et Dionysos.

Interview de Charles Handy du 13 mai 2017

Par Les Echos Business

« Le management, c’est comme un doughnut »

Pour le professeur Charles Handy, il est urgent de trouver de nouveaux modèles de participation qui permettent aux salariés de mieux faire entendre leur voix.

Charles Handy, dans « The Second Curve » (« La Seconde Courbe »), votre nouvel opus, vous liez le succès dans la durée au renouvellement continu. Pourquoi ?

La vie, que ce soit celle d’une personne ou d’une entreprise, peut être décrite comme une série de courbes. Toute courbe démarre du bas avant d’atteindre son apogée, mais finit aussi inévitablement par redescendre. Aucune entreprise ne peut croître indéfiniment, aucun succès ne dure éternellement. Si elles veulent continuer à se développer, les entreprises doivent entamer ce que j’appelle une seconde courbe d’évolution, avant que la première ne s’effondre. Les leaders doivent enclencher quelque chose de nouveau, alors même que l’entreprise est encore en pleine croissance : décider d’une nouvelle direction à l’occasion d’une réorganisation des activités ou du lancement d’un nouveau produit ou de nouveaux services. Cela peut sembler contre-intuitif et certains chefs d’entreprise m’ont dit qu’ils craignaient de cannibaliser leurs propres produits en se renouvelant. C’est pourtant selon moi la meilleure réponse à avoir lorsqu’on connaît le succès. Steve Jobs était le roi des « secondes courbes ». Il lançait toujours de nouveaux produits avant que les gens ne se lassent des précédents…

Paradoxalement, vous critiquez l’obsession de la croissance…

Il est temps de remettre en question le concept de croissance. Pourquoi vouloir grandir, encore et encore ? Nous voyons que de nombreuses entreprises sont devenues trop grosses et trop bureaucratiques, au détriment des salariés. Beaucoup d’entreprises sont comme des chenilles, qui ne pensent qu’à grossir pour devenir des papillons, sans trop se poser de questions. Or, les entreprises qui réussiront le mieux seront des petits papillons – de petites entités travaillant aux mêmes objectifs mais de manière indépendante, et pratiquant des formes de management décentralisées et innovantes.

Quelles nouvelles pratiques managériales pourraient émerger ?

Le management ne va pas disparaître, car le besoin de discipline et de règles sera toujours présent dans les entreprises. Par le passé, j’ai développé l’idée d’une forme de management qui s’apparenterait à un doughnut. Cette image est plus que jamais d’actualité pour définir ce que devra être le management de demain. La confiture au centre du doughnut représente les règles, les procédures et les responsabilités requises par chaque poste. Mais autour de la confiture, le beignet représente un espace dans lequel chaque employé peut utiliser sa personnalité, ses compétences et ses envies pour aller plus loin dans son travail et pour proposer des innovations. Les managers vont devoir apprendre à créer cet espace au sein de leurs équipes pour pousser les employés à être créatifs et à prendre des initiatives, tout en les formant, pour s’assurer qu’ils comprennent les règles et la culture propre à l’entreprise

Cela dopera-t-il l’engagement des ­salariés ?

Jusqu’à 80 % d’entre eux s’ennuient au travail ! Adopter des techniques managériales qui n’étouffent pas les employés et leur laissent la place de s’exprimer est une première étape. Au-delà, faire en sorte qu’ils ressentent que l’entreprise leur appartient importe beaucoup. Il faut associer les employés aux grandes décisions. Cela ne veut pas dire qu’ils doivent siéger au conseil d’administration, mais il est urgent de trouver de nouveaux modèles de participation qui leur permettent de mieux faire entendre leur voix. Un exemple très intéressant est le modèle d’entreprise à actionnariat salarié proposé par le groupe John Lewis au Royaume-Uni.

Un autre défi est de travailler avec des équipes éclatées aux quatre coins du globe…

Internet a révolutionné le travail à distance. Toutefois, il est très important de connaître les personnes avec qui l’on travaille. Il faut que tous les membres d’une équipe puissent se rencontrer en personne, avant de se lancer dans un projet en commun. Les managers devraient donc s’efforcer d’organiser des rencontres annuelles entre tous les collègues éparpillés à travers le monde, afin que la confiance puisse s’instaurer.

 

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