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C’est parfois en voulant faire progresser ses équipes qu’un manager les démotive. Ce « syndrome de l’échec programmé » peut conduire un dirigeant à rendre d’excellents éléments peu performants. Comment éviter ce piège ?

Qu’est-ce que le syndrome de l’échec programmé ?

Un bon manager peut conduire d’excellents collaborateurs à l’échec. C’est ce qu’ont théorisé Jean-François Manzoni et Jean-Louis Barsoux, spécialistes du leadership, notamment dans leur livre « Relations difficiles au travail ». « Lorsqu’un supérieur commence à avoir des doutes sur l’efficacité d’un collaborateur ou d’une collaboratrice, une dynamique particulière se met en place », explique M. Manzoni dans une interview au journal suisse Le Temps de janvier 2017. Il le surveille alors de plus près et devient de plus en plus directif. L’employé comprend qu’il est considéré comme non performant ; cela diminue sa motivation et donc ses performances, créant un cercle vicieux. Le supérieur se focalise uniquement sur les performances négatives de son collaborateur. Celui-ci, à son tour, perd de sa considération pour son responsable, ne voit plus que ses réactions négatives, et les relations s’enveniment.

Ce phénomène touche souvent les collaborateurs dont le supérieur se met à douter, mais cela peut aussi se produire entre deux services, envers un nouveau dirigeant qu’on estime pas à la hauteur du précédent, dans les relations interculturelles, au sein des conseils d’administration…

Le patron mine la performance du collaborateur qu’il veut aider

Cet effet Pygmalion inversé découle d’une tendance humaine répandue, « l’étiquetage » des personnes que l’on côtoie : sympathique/antipathique, performant/non performant… Selon la théorie de l’Echange Leader Membre, 90% des managers mettent cinq jours à catégoriser leurs collaborateurs comme « in » (compétents) ou « out » (incompétents). Et « la qualité du travail et les compétences des individus interviennent peu dans l’opinion qu’ont les cadres dirigeants de leurs subordonnés« , affirme l’expert en communication Pascale de Lomas dans un article du Temps de septembre 2016. Or, ces étiquette sont très difficiles à enlever, car un « biais de confirmation » fait que le cerveau ne va retenir que les éléments qui vont dans le sens de l’opinion forgée et minimiser les faits contradictoires.

Le processus est auto-réalisant

Quand un manager se focalise sur les erreurs d’un membre de son équipe, il lui colle une étiquette de « sous-performant ». Jean-François Manzoni, aujourd’hui président de l’IMD de Lausanne, explique au Temps que « le processus est auto-réalisant » et inconscient : « Le patron estime avoir fait de son mieux pour aider son collaborateur, mais il a instauré une dynamique qui mine la performance de ce dernier. » Selon le président de l’IMD, « tout le monde le fait. Souvent avec les meilleures intentions » : pour les managers, il s’agit de « limiter la casse » lors de contre-performances.

Rendre son autonomie au collaborateur

La première difficulté est de prendre conscience que l’on a enclenché involontairement ce processus. Cela représente « 50% de la bataille« , selon Jean-François Manzoni. Pour éviter une sortie douloureuse – départ de l’employé, patron de plus en plus intransigeant – il faut instaurer un véritable dialogue. L’employeur doit exprimer ses inquiétudes quant aux performances de son subalterne, mais il doit également reconnaître son comportement et les conséquences négatives qu’il a eu sur son collaborateur. Dans leur livre, MM Manzoni et Barsoux conseillent aux managers de s’aider en tenant un journal, en enregistrant les réunions et en réalisant des études de cas.

Le manager doit « s’impliquer davantage avec ceux qui en ont besoin, d’une façon qui ne soit pas démotivante ni déshumanisante« 

Mais le manager n’a pas forcément intérêt à se comporter de la même façon avec tous ses collaborateurs : selon Jean-François Manzoni, il doit au contraire « s’impliquer davantage avec ceux qui en ont besoin, d’une façon qui ne soit pas démotivante ni déshumanisante« , et avoir une attitude positive et encourageante avec toute son équipe. Dans ces cas-là, il est souvent conseillé de rendre son autonomie au collaborateur : lui demander de fixer lui-même ses objectifs, organiser des entretiens où il doit trouver lui-même les réponses à ses questions, en un mot le rendre acteur de son avenir professionnel.

 

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