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Introduite en Europe pour la première fois au XVIIIe siècle par un jésuite français, le père Jean-Jacques Amiot, L’Art de la Guerre est aujourd’hui unanimement reconnue comme un classique de la stratégie, à l’égal des livres de Machiavel ou de Clausewitz. Il s’agit d’un traité, en treize articles, composé par Sun Tzu (ou Sun Zi), stratège et général chinois vivant au Ve siècle av. J-C, au temps de Périclès et des stratèges d’Athènes.

Sun Tzu souligne explicitement, à travers ses articles, les processus de stratégie qui correspondent aux éléments classiques de la planification d’entreprise, notamment la prévision, l’évaluation et la formulation d’une stratégie de compétitivité. Celle-ci doit être accompagnée par des équipes motivées, mais aussi par une rapidité et une puissance d’action dans son application. Le processus doit rester flexible et modulable : la stratégie doit être adaptable et modifiable à tout moment en fonction des changements. Si L’Art de la Guerre vaut la peine d’être étudié par tout manager, c’est parce que cette œuvre va au cœur du problème du conflit et de la survie, et ce d’une manière pragmatique.

Les cinq facteurs fondamentaux et les sept comparaisons

Sun Tzu énumère cinq facteurs fondamentaux pour réussir une stratégie :

  • connaître le Tao, qui « fait naître l’unité de pensées », nous inspire une même manière de vivre et de mourir et nous rend intrépides et inébranlables dans les malheurs et dans la mort. Le manager pourra y reconnaître la nécessité d’éléments communs qui inspirent le groupe et ses collaborateurs ;
  • connaître « le temps et le ciel », le Yin (éléments féminins : la lune, l’eau, faible, sombre, doux, passif) et le Yang (éléments masculins : le soleil, feu, fort, clair, dur, actif), qui symbolisent le dualisme chinois de l’univers, de l’alternance des forces et des faiblesses ;
  • « l’espace et la terre » ne sont pas, pour Sun Tzu, moins dignes de notre attention. Bien étudier, c’est « avoir la connaissance du haut et du bas, du loin comme du près, du large et de l’étroit, de ce qui demeure et de ce qui ne fait que passer » ;
  • le commandement : « l’équité, l’amour pour ceux en particulier qui nous sont soumis et pour tous les hommes en général ; la science des ressources, le courage et la valeur, la rigueur…, les vertus nécessaires… seules peuvent nous mettre en état de marcher dignement à la tête des autres » ;
  • la méthode, c’est-à-dire « l’organisation, la promotion des officiers, la répartition des ressources », on parle aujourd’hui d’organisation, de ressources humaines, de logistique, de contrôle…

À ces cinq facteurs fondamentaux, Sun Tzu ajoute sept comparaisons : « Quel souverain possède le Tao ? » ; « Quel général est le plus capable ? » ; « Qui aura les éléments et le terrain pour lui ? » ; « Qui possède la meilleure méthode et le meilleur commandement ? » ; « Quelle armée est la plus puissante ? » ; « Quels soldats sont les mieux entraînés ? » ; « Qui distribue avec le plus de clairvoyance récompenses et châtiments ? ».

Le dirigeant trouve tout ce qu’il lui faut dans ce petit cours de « management de stratégie ». Sun Tzu réduit habilement l’art de l’analyse aux cinq éléments fondamentaux : mesurer, estimer, calculer, comparer et évaluer la probabilité de succès. Tout cela s’accorde parfaitement avec les schémas classiques de la littérature moderne de la stratégie et du management.

Les quinze principes ou l’art du gestionnaire

1. Comparer. Sun Tzu insiste sur l’importance du benchmarking.

2. Diriger. Le commandement, avec ses cinq vertus – la sagesse, la sincérité, l’humanité, le courage et la rigueur – est la clef de tout ; c’est pourquoi la stratégie comprise dans le sens authentique, étymologique, de l’art du général, est capitale. Bien diriger et manager est fondamental.

3. Partager une vision commune avec toute la hiérarchie, verticalement et horizontalement.

4. Déléguer le pouvoir. Sun Tzu applique le principe de la subsidiarité et souligne l’importance de la délégation intelligente du pouvoir, du choix de l’homme qu’il faut (the right man) pour la mission, de la confiance et de la délégation.

5. Vaincre par stratagème. La plus grande victoire selon Sun Tzu, c’est de gagner sans que le sang coule. La ruse joue évidemment un rôle fondamental.

6. Créer une situation. Créer un Shi, une situation, une énergie, un pouvoir. Le manager évite la confrontation directe et crée ou emprunte des forces extérieures pour les manipuler à son avantage.

7. Être prudent est une qualité évidente qui doit s’accompagner d’une grande préparation et d’un planning approfondi, car il s’agit de la survie.

8. Prendre l’initiative et la garder à tout moment, maîtriser et contrôler le « timing » et le lieu du combat.

9. Combattre efficacement et rapidement. Ne pas prolonger inutilement les combats reflète le réalisme et la modération « modernes » de l’auteur.

10. Duper : la guerre ou le conflit est pour lui plus un combat d’esprit entre deux parties qu’un duel physique entre forces militaires, d’où l’importance de la duperie.

11. Utiliser des forces extra-ordinaires : avoir des ressources à disposition en plus de celles déjà engagées permet de gagner.

12. Manœuvrer est un art très difficile mais essentiel, si l’on souhaite réussir une stratégie de la non-confrontation et remporter la victoire.

13. Être flexible : avoir la capacité de s’adapter ou de changer ses plans en fonction de nouveaux critères.

14. Concentrer ses forces en un seul endroit, de préférence ses points forts contre les points faibles de l’adversaire.

15. Espionner permet d’avoir des renseignements fiables, pour pouvoir prendre de bonnes décisions. Sun Tzu estime que le métier d’espion est très honorable et doit être bien rémunéré.

Conclusion et avenir

Pour Sun Tzu, le défi de la guerre est donc davantage une affaire d’esprit qu’un affrontement de forces. Le monde du manager est très similaire.

Survivre n’est pas une obligation, mais à partir du moment où l’homme décide qu’il le souhaite survivre, il doit se battre. Pour sortir vainqueur du conflit inévitable lié aux ressources limitées, il met en place une stratégie de survie, qui, si elle n’est pas non plus obligatoire, optimise ses chances de survie.

Les trois messages forts de notre stratège sont :

« Connais-toi toi-même, connais ton ennemi, ta victoire ne sera jamais mise en danger. Connais le terrain, connais ton temps, ta victoire sera alors totale. »

« L’art suprême de la guerre, c’est soumettre l’ennemi sans combat »

« La guerre est une affaire grave pour le pays, c’est le terrain de la vie et de la mort, c’est la voie qui mène à la survie ou à l’anéantissement ; il est impossible de ne pas l’étudier. »

Cette dernière maxime reste le fondement de toute réflexion stratégique.

Cette chronique reprend les principaux éléments du rapport de fin d’étude du Centre des hautes études d’assurances (1998/2000) de Stevan Corbett.

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