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Le CJD est un formidable mouvement pour expérimenter ce qui peut améliorer les entreprises. Il y a cinq ans, sous le mandat de Christophe Praud, le CJD a lancé des expérimentations autour de l’agilité. Avec Christophe Riboulet, un comité de pilotage a regardé comment l’un des aspects du Lean management — celui qui s’attache à faire grandir les collaborateurs un peu chaque jour –  permettait de rendre l’entreprise plus agile. Il ne s’agit donc pas de l’ensemble des pratiques agiles, on devrait plutôt parler d’un « Lean made in CJD ».

C’est la troisième année que j’anime ce comité de pilotage Agilité. Nous avons beaucoup appris il est temps d’écrire cet article. Je vais commencer par notre ambition. Le CJD a toujours eu 10 ans d’avance. Aujourd’hui, en matière de management, avouons que nous sommes davantage suiveurs. Dans ce domaine, nous souhaitons reprendre notre avance, tout en travaillant à développer la performance globale de nos entreprises.  Avec la performance globale, l’entreprise est considérée comme un bien commun, cherchant une relation vertueuse avec l’ensemble de ses parties prenantes : collaborateurs, clients, dirigeants, fournisseurs, état, société civile et nature.

Les objectifs de la démarche

Nous pourrions dire que nous cherchons « une forme organisationnelle dans laquelle les salariés sont libres et responsables dans les actions qu’ils jugent bon d’entreprendre ». Certains remarqueront que c’est l’une des définitions de l’entreprise libérée. Oui, nous avons le même objectif, mais notre méthode est très différente. Elle a l’avantage de mettre du rythme, d’être très structurante… et donc d’éviter le « saut en parachute ». Elle est soutenante pour les cadres et les collaborateurs, notamment pour s’accorder sur ce qu’il est « bon » d’entreprendre. Nous allons plus loin, plus en profondeur, par l’analyse structurée.

Et nous avons un autre objectif : rendre l’entreprise apprenante.  Avec la robotisation, la numérisation et l’intelligence artificielle, dans 15 ans la moitié des emplois actuels n’existeront plus selon les experts. Dès lors, l’agilité est le principal facteur clé de succès de toutes les entreprises, et elle repose sur la capacité à apprendre vite pour agir juste.

Comprendre les vrais enjeux de son entreprise

Décrivons la démarche : au minimum une fois par semaine chaque collaborateur détecte un problème ou « écart à l’idéal ». Pour l’aider, on met en place du management visuel à la fois sur les délais et la qualité, des standards et une liste des domaines prioritaires.

Ensuite le collaborateur doit se demander en quoi c’est un problème et chercher à chiffrer les conséquences de ce problème. Comme il laisse un écrit, cela permet à son manager de l’accompagner dans la prise en compte des enjeux de son travail au sein de l’entreprise. Cela joue sur sa compréhension globale aussi bien que sur le sens et la motivation. C’est aussi pour le dirigeant l’occasion de comprendre les vrais enjeux de son entreprise !

Pour continuer, le collaborateur va regarder s’il existe un standard, c’est-à-dire une « meilleure façon de faire connue ». Si non, est-ce une bonne idée d’en choisir un ? Si oui, a-t-il été respecté ? Sinon pourquoi ? Est-il améliorable ? Cette démarche est donc très structurante pour l’entreprise. De plus, les standards (ou processus) sont vivants : ils sont sur papier dans la zone de travail, on n’hésite pas à les griffonner, ils évoluent tout le temps.

Vient après l’étape la plus importante et la plus délicate : analyser pourquoi il y a cet écart… A cause de ce qu’il a fait ou pas. Car il est interdit d’accuser l’autre, il doit chercher uniquement sa part, même si elle est petite.  Ce faisant, pour comprendre, il va généralement devoir communiquer avec ses clients et fournisseurs internes. L’entreprise est un système où tout est lié, l’analyse va donc souvent l’amener assez loin. Comme le manager verra ce qu’il n’a pas compris, il pourra l’accompagner, et cela dans les dimensions techniques, organisationnelles et relationnelles.

C’est seulement après ces étapes, que le collaborateur pourra proposer deux types d’actions : l’une immédiate « un pansement qualité » ou une « action pour valider au plus vite une hypothèse » dans un esprit « lean start-up » ; et l’autre dans un esprit d’amélioration durable, en réfléchissant à la « cause racine » sur la base de l’analyse de plusieurs problèmes, qui dévoilent avoir la même cause. Cette réalité étant souvent jusqu’alors invisible, c’est ce que l’on appelle « traiter les vrais problèmes ».

Enfin, dernière étape, le collaborateur remplit un management visuel pour le suivi de ses actions et de ce qu’il en apprend. On est dans un schéma d’apprentissage continu type « PDCA ou Roue de Deming ».

L’une des grosses différences avec un système ISO, c’est que l’on ne transmet pas le problème à un responsable qualité : c’est celui qui détecte le problème qui est responsable de le résoudre. La bonne nouvelle c’est que les systèmes ISO n’interdisent pas ce fonctionnement : c’est idéalement compatible. De plus, si l’amélioration imaginée par un collaborateur touche d’autres personnes, il doit les réunir. Ce qui fait que cette démarche est aussi idéalement compatible avec les outils de l’intelligence collective.

Ce que nous avons appris

Il y a deux ans, le comité de pilotage a contacté presque toutes les entreprises qui ont expérimenté ces cinq dernières années. On en a tiré de nombreux enseignements, en voici les trois principaux :

  • Les résultats sont très clivés : soit ça cartonne soit ça ne prend pas. Quand ça cartonne, on a des situations du type « j’ai démarré parce que la boîte était en difficultés et je ne savais plus comment faire. Trois ans après ma problématique est : qu’est-ce que je vais faire d’autant de trésorerie ? »

On s’est demandé pourquoi ça prenait ou pas, notre réponse est dans les deux points suivants :

  • La démarche demande de vrais changements de posture (une posture c’est une croyance associée à des compétences et des émotions). Pour nous, c’est la preuve que l’on travaille sur des fondamentaux, qui changent vraiment les choses. Nous avons alors travaillé sur un référentiel des postures et il y en a beaucoup ! Je vais en citer trois qui nous ont demandé du travail, car dans la pratique elles s’avèrent très difficiles :
  1. Pour les cadres :  Pour faire grandir mes collaborateurs, le plus efficace est de les coacher en permanence par le questionnement ouvert. Ce qui implique d’arrêter totalement de leur dire comment faire (sauf pour un débutant).
  2. Pour les collaborateurs : comprendre qu’arrêter le travail « habituel » pour investir du temps dans l’amélioration de mon travail par la résolution de problèmes, fait partie de mon travail. Car c’est très rentable à moyen et long termes pour l’entreprise et pour moi.
  3. Pour tous : la bienveillance, condition de la confiance, est le facteur de succès numéro un parce qu’elle est nécessaire pour oser deux choses : parler des problèmes et prendre des initiatives (Une étude interne chez Google est arrivée au même résultat).
  • Ceux qui réussissent sont ceux qui se font accompagner. Nos efforts sur les méthodes pour faire soi-même n’y ont rien changé, même avec les dirigeants qui y croient beaucoup au début. Cela paraît simple, mais ça ne l’est pas : on n’obtient pas des résultats aussi impressionnants sans plusieurs changements de postures et on ne change pas ces postures sans accompagnement.

 

Pour le Copil Agilité (Christophe Riboulet, Mathilde Zerlauth, Khuê-Linh Truong et Célia Chevalier)

Louis-Marie Blanchard

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